Pause Déjeuner [Rukia / Yoruichi]

La journée promettait d’être… géniale. Le ciel était d’un bleu sans nuages, et le soleil brillait si fort que le seul fait de rester dehors dans l’ombre décharné des arbres environnant était fatal. Malgré la vague de chaleur qui commençait à atteindre gravement la ville de Karakura, il faisait encore frais très tôt le matin, unique moment de détente absolu sans transpirer en ouvrant seulement sa fenêtre. C’était beaucoup plus insupportable pour Rukia Kuchiki, qui logeait –comme à chaque fois qu’elle se trouvait dans le Monde des Humains, dans le placard d’Ichigo. Qu’est-ce qu’il pouvait faire chaud là-dedans ! Totalement intenable. Il ne pouvait pas installer un climatiseur ? Ou un ventilateur quoi ! Mais rien à faire, son ami roux lui riait au nez ou bien lui ébouriffait les cheveux en lui disant qu’elle était chiante dès qu’elle évoquait sérieusement l’idée. C’était décidé, la nuit prochaine, c’est LUI qui dormirait dans ce foutu placard surchauffé et c’est ELLE qui serait soigneusement calée sur un matelas confortable à dormir à côté de la fenêtre - grande ouverte pour essayer d’attirer dérisoirement une faible bourrasque. La jeune Kuchiki secoua la tête d’un air agacé, faisant balancer ses mèches noires sur ses épaules dans tous les sens puis referma la porte de sa ‘chambre’ d’un coup sec, histoire de réveiller Ichigo brutalement comme à son habitude. Sauf qu’il n’était pas là. Encore mieux tiens. Un petit mot reposait sur son lit défait. « Suis pas là, aujourd’hui on s’absente tous. A plus. » Très direct, le mot. Rukia plissa les yeux et se souvint brutalement qu’aujourd’hui était l’anniversaire de mort de la maman d’Ichigo. Son regard refléta brièvement un certain chagrin pour son ami, c’était donc pour cela qu’il paraissait absent et regardait ailleurs ces temps-ci. Rukia froissa le mot, l’envoya bouler dans la corbeille et piétina Kon en enjamba la fenêtre. Pas possible celui-là non plus. Elle se laissa glisser au sol, lissa les pans de sa jupe plissée et ajusta le col de son chemisier blanc à manches courtes avant d’empoigner son sac qu’elle venait de déposer sur le bitume. La shinigami soupira largement, se demandant pour la énième fois pourquoi elle jouait cette comédie d’aller tous les jours sagement au Lycée –alors qu’elle avait déjà toutes les connaissances nécessaires et bien plus !, alors qu’elle pouvait tranquillement flâner dans les rues, à la recherche d’Hollow. Mais il fallait croire que cette comédie lui plaisait, elle trouvait assez grisant de pouvoir rire avec insouciance avec ces humains ; ils étaient bien sympathiques. Être sur terre était un peu comme des vacances pour elle, sachant qu’à la Soul Society il y avait beaucoup de tensions en ce moment. Alors là voilà, envoyée par son Taisho à Karakura pour surveiller ce taux d’Hollow qui augmentait anormalement.

Rukia aperçut enfin les contours du bâtiment de son école, et elle pressa doucement le pas. Vivement que cette journée se finisse, la chaleur commençait déjà à se faire sentir sérieusement. La jeune fille salua un groupe de lycéennes venues à sa rencontre, avant de se glisser habilement derrière son pupitre pour un nouveau cours de mathématiques qui ne lui apprendrait rien du tout… Le seul point positif de cette matière était le professeur qui l’enseignait, il était d’un caractère à s’emporter vite et ne supportait pas que Kuchiki lui fasse des remarques sur ses diplômes si forts vantés mais non mérités par des petites erreurs parfois dans ses calculs… ou dans des explications obscures qu’elle s’empressait d’éclaircir avec un naturel bouleversant. Rukia esquissa un sourire amusé à ces souvenirs et s’étira sur sa chaise avant de répondre au « Bonjour » d’un autre élève.

Les trois heures de cours passèrent lentement, appuyées par l’écrasante température qui les fatiguait à force de trop réfléchir sur les problèmes posés par leur professeur. Ce fut donc dans un soulagement total que la cloche retentit et que les élèves s’éparpillèrent dans le bâtiment pour déjeuner dans l’ombre d’un mur en s’éventant. Rukia se pencha et attrapa un sandwich tout bêtement acheté à la première boutique présentée ainsi qu’une brique de jus de pomme qui lui résisterait encore quelques minutes avant que le minuscule tuyau en plastique n’accepte enfin d’entrer dans le petit trou habilement camouflé. Elle gravit les marches avec empressement, et déboucha sur le toit du Lycée. Etrangement, il était désert. Tant mieux, elle n’avait pas très envie de compagnie là maintenant… Rukia mordit dans son sandwich avec appétit, dos contre un mur, tout en observant les alentours d’un œil alerte. Une attaque pouvait survenir à n’importe quel instant.